Sanction d’une dérogation illégale ou inexistante

Relaxe pour défaut de preuve

A propos d’un projet de stockage de déchets, une relaxe doit être prononcée, dès lors qu’il n’est pas prouvé la présence d’espèces protégées sur un terrain où des travaux de drainage, de décapage et de défrichement ont été réalisés sur onze parcelles, constituées de prairies humides, d’une végétation et d’une faune en lien. Tout d’abord, la présence d’espaces hydromorphes et autres prairies humides n’est relevée que localement, aux abords du projet, pour une emprise modérée tandis que l’habitat spécifique des espèces protégées visées par la citation directe n’est pas caractérisé. Ensuite, l’un des auteurs du rapport de recollement et synthèse des études- techniques, réalisé à l’occasion de la demande d’autorisation du projet, a expressément noté qu’aucune espèce protégée n’avait été relevée sur l’emprise du projet de stockage. Enfin, les photographies jointes en annexe du procès-verbal, pas plus que celles jointes au rapport d’Eaux et Rivières de Bretagne, n’objectivent la présence sur le site d’espèces protégées que les travaux auraient mises en péril. En conséquence, il n’est pas suffisamment dé- montré que le maître d’ouvrage ait sciemment commis les infractions qui lui sont reprochées par la partie civile.

Cass. crim. 26 juin 2012, n° 11-85.543

Indemnisation des associations de protection de l’environnement

Une association de protection de l’environnement a obtenu réparation, à hauteur de 4 000 euros au titre du préjudice subi à la suite de travaux d’extension d’un golf, réalisés dans un espace remarquable du littoral, éga- lement classé en site Natura 2000, qui a porté atteinte par destruction directe, à l’habitat particulier à certaines espèces protégées (notamment une zone humide), sans qu’aucune dérogation n’ait été sollicitée, ni obtenue. Le juge refuse néanmoins la remise en état sollicitée par l’association, compte tenu de l’incompétence du juge judiciaire pour ordonner, en l’absence de voie de fait, les mesures de remise en état de travaux publics relevant de la compétence du juge administratif.

CA Caen, 15 avr. 2013, n° 11/01015

Remise en état des lieux

A propos de la remise en état des lieux et la destruction d’un bassin d’aviron impactant des herbiers lacustres au sein d’une réserve naturelle régionale, le juge considère que la régularisation de cet ouvrage dans son en- semble ne paraît pas possible. Pour autant, il se refuse à en prononcer la démolition car le retrait des aménage- ments réalisés - pieux de fondation, corps morts immergés et ancrages du bassin -, qui constitue une opération technique lourde, est susceptible d’emporter des modifications de cette partie du lac, avec à la clef des risques sanitaires sur la qualité de l’eau potable et des risques pour les herbiers protégés qui ont pu se développer au- tour des dispositifs immergés, alors que le maintien de ces derniers n’aurait pas de conséquences négatives sur l’environnement.

CAA Lyon, 23 oct. 2018, n° 17LY04341

A propos d’un projet de contournement routier de 3,2 km impactant de très nombreuses espèces protégées et la destruction de 22 ha d’habitats de ces espèces, le juge estime que celui-ci ne peut être régularisé par une au- torisation modificative. Le tribunal ordonne l’interruption des travaux entrepris et enjoint au département de la Dordogne de procéder à la démolition des éléments de construction déjà réalisés (notamment deux ponts) et de remettre les lieux en état dans un délai de 12 mois. La cour administrative d’appel puis le Conseil d’État ont confirmé l’illégalité de ce projet et l’obligation de démolition des ouvrages et de remise en état du site dans les 12 mois.

A la suite de l’inexécution de cet arrêt, saisie par un collectif d’associations, la CAA estime que si la démo- lition des ouvrages demandés aura nécessairement des conséquences sur les espèces protégées, les mesures d’accompagnement qui devront être prises, notamment pour limiter les matières en suspension, et du choix des techniques à mettre en œuvre, ces conséquences ne sont pas, compte tenu de la restitution du site dans son état initial, plus lourdes que celles qui résulteraient de la disparition définitive des habitats d’espèces protégées détruits. Le seul fait que de nouvelles espèces protégées auraient été identifiées sur le site ne saurait constituer en soi un obstacle à l’exécution de l’injonction ordonnée par la Cour.

De même, la mise en œuvre d’un comité de suivi des travaux de démolition imposé par un arrêté de prescrip- tion du préfet n’a ni pour objet, ni pour effet de faire obstacle à cette injonction. Enfin, les difficultés techniques rencontrées pour démolir les piles de pont en berge et sur le lit du cours d’eau (risque de fracturation du toit calcaire, pollution de la nappe souterraine) ne constituent pas pour autant une impossibilité de nature à faire obstacle à l’exécution de l’arrêt.

Constatant que la volonté du département de retarder l’exécution de l’arrêt de la CAA du 10 décembre 2019, le juge prononce, d’une part, une astreinte de 3 000 euros par jour de retard jusqu’au début effectif des travaux (applicable dans les six mois du jour de l’arrêt) et, d’autre part, une astreinte de 5 000 euros par jour de retard si la réalisation de l’ensemble des travaux de démolition et de la remise en état des lieux n’a pas été exécutée dans un délai de douze mois à compter de la date de l’arrêt.

TA Bordeaux, 9 avr. 2019, n° 1800744

CAA Bordeaux, 10 déc. 2019, n° 19BX02327

CE, 29 juin 2020, n° 438403

CAA Bordeaux, 7 juill. 2022, n° 21BX02843

Page mise à jour le 30/08/2023
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